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Trois ans déjà... Des années ont passé !

par Ghislaine Bourque

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Ma mère était atteinte de la maladie à corps de Lewy, dont les symptômes s’apparentent à ceux de l’Alzheimer et du Parkinson. Elle est décédée le 10 février 2017. Le texte qui suit est écrit au «vous» car j’ai toujours vouvoyé mes deux parents.

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Oui, ma chère maman, comme vous devez être bien dans cet autre monde, sans souffrance, après un passage extrêmement difficile où vous avez lutté et lutté pour rester avec nous, même si vous vous noyiez dans vos sécrétions avec une pneumonie carabinée. Je ressens souvent votre présence et c’est infiniment bon!

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Pour vous accompagner dans votre atroce maladie, j'ai déballé l'ensemble de mes ressources intérieures et je me sens plus riche après vous avoir aimée de toutes mes forces durant ces sept années où votre cerveau était devenu comme un gruyère, avec de plus en plus de trous au fil du temps.  Vous aviez oublié mon nom, vous aviez oublié que j’étais votre fille, mais nos âmes se sont reconnues jusqu’à la fin.

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J’ai pu passer de la souffrance à la sérénité lorsque j’ai compris quelle route emprunter pour me connecter cœur à cœur avec vous. Je vous ai offert une qualité de présence affectueuse, tendre et enveloppante et mon cœur est heureux aujourd’hui de vous avoir donné le meilleur de moi. J'ai pu vous regarder vraiment, avec pour seul langage le cœur dans les yeux, et vibrer à la beauté de votre être.

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Ainsi, je suis très fière d’avoir dépassé mes barrières pour vous offrir des contacts physiques doux, tendres et respectueux. Nous n’étions pas habituées à nous toucher toutes les deux! Oh que non! Même les câlins ne faisaient pas partie de nos habitudes mère-fille. Mais j’ai bellement appris! C’est aussi avec un regard plein d’amour, un ton de voix doux et empathique que je vous ai accompagnée au quotidien. Je suis souvent entrée avec vous dans votre monde pour vous sécuriser. Ensemble, nous avons ri et pleuré. J’ai écouté le silence en observant vos moindres indices afin qu’ils guident mon intuition pour vous donner ce dont vous aviez besoin dans l’ici et maintenant.

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Cependant, après avoir suivi une formation en Soin Relationnel avec Fleur-Lise Monastesse, cette belle grande dame de cœur qui nous transmet des façons d’être et des outils pour accompagner avec tendresse des personnes vulnérables ou en fin de vie, j’ai bien vu que j’aurais pu vous offrir encore une meilleure qualité de présence. J’aurais pu coller souvent ma joue contre la vôtre. Par cette proximité, vous auriez même pu me donner des doux baisers. Comme ça aurait été bon pour nous deux! Pour nous créer une bulle de vibrations d’âmes, j’aurais pu utiliser le chant, pas celui de performance (je n’ai aucun don pour chanter sur le bon air et la bonne note!), mais celui venant directement de mon cœur et que je vous aurais murmuré à l’oreille, soit un chant connu ou un chant inventé sur-le-champ! J’aurais pu demander à mes petites-filles de chanter ensemble autour de vous, en vous tenant la main. Elles auraient même pu se coucher à vos côtés. Mais… comme me l’a si bien dit la sage Suzanne,  mère de Fleur-Lise, «ce n’était pas dans le Grand Plan». Lorsque vous étiez sur le point de mourir, j’ai eu un élan fou pour vous chanter l’Ave Maria, votre chant préféré de tous les temps. Je n’ai pas osé, mon égo me disait: « Pour qui tu te prends, tu ne sais pas chanter!» Mais mon cœur aurait su! Dommage, ce n’était pas dans le Grand Plan. Au moins, lors de vos funérailles, mon fils Jean-Philippe vous l’a offert avec recueillement, tendresse et amour, comme s’il vous tenait la main en vous la fredonnant à l’oreille. Ce chant fut comme une prière, un rituel sacré, un baume sur mon cœur et qui sait, vous l’avez possiblement entendu de là-haut…

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Vous aviez laissé une petite boîte à ouvrir après votre Grand Départ; il contenait ce message :

À ouvrir après ma mort

«Sincères remerciements pour tout ce que vous avez fait pour moi. Je vous attendrai tous pour vous recevoir. Ne pleurez pas. Confiez-vous à moi. Je vais continuer de vous aider, je vous ai tellement aimés.

Je ne vous oublierai jamais… jamais…

À tous, au revoir!» (extrait de mon livre Et si perdre la tête rapprochait les cœurs..., p. 153)

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Je vous crois ma chère maman! J’ai toujours pu vous faire confiance! Vous étiez une femme de parole. Je sais qu’actuellement vous veillez sur moi et vous m’aidez à cheminer et à grandir.

Merci pour tout... 

Je vous aime. ðŸ’—

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P.-S. â€‹Si j’ose écrire mes regrets aujourd’hui, c’est pour donner des suggestions d’activités aux proches et aux intervenants qui côtoient des êtres en perte cognitive. Plusieurs petits gestes de proximité sont possibles avec ces personnes vulnérables, si nous laissons parler notre cœur tout en faisant taire notre égo. Le lien affectif est ainsi nourri et il est autant bienfaisant pour les aidés que pour les aidants, et même pour les observateurs.

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Ghislaine Bourque et sa mère Rosée

Je vous invite à visionner une courte vidéo (2 min) dans laquelle Fleur-Lise Monastesse accompagne Mme Lucienne. J'aurais aimé offrir cette qualité de présence à ma mère, en me servant du chant spontané, d'autant plus qu'il arrivait que maman chante comme Lucienne. J'accueillais son «râle» comme un chant, il était plein d'intonations, je le recevais comme un cadeau, je devenais très émue et je la remerciais de me donner son chant du cœur, sauf que moi, je ne pensais pas que je pouvais aussi chanter pour elle!

 

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